Éphémère et ironique, le recueil des Célébrades de Bernard Anton est une compilation de poèmes : un recueil moderne, à mi-chemin entre liberté et respect des traditions du « haïku », ce célèbre poème japonais, qui met à l’honneur des instants fugaces, pour les transformer en scènes poétiques et remarquables. L’ouvrage en question a pu être édité chez les Impliqués Éditeurs, une branche de la maison d’édition L’Harmattan, fondée en 1975. Son auteur, Bernard Anton, est un nom déjà associé à la poésie au Québec, lieu de résidence de l’artiste. Il n’est pas étonnant de découvrir l’univers et l’atmosphère du recueil, lorsqu’on connaît l’expérience et les productions littéraires de son créateur prolifique, qui se dédie à une écriture spontanée et poétique, où s’expriment les émotions et l’admiration pour la nature spectaculaire et sereine à la fois.
Dans ce livre court, de moins de 100 pages, le poète Bernard Anton évoque le quotidien et l’extraordinaire. On y découvre une ouverture lyrique, où l’auteur se laisse envelopper par l’aura envoûtante de sa muse, Brigitte Bardot. L’artiste incarne les idéaux du poète lui-même, l’image qu’il s’est façonnée de la chanteuse, actrice et mannequin de légende est semblable à celle d’une walkyrie. Une créature parfaite en tous points, voix forte des animaux qui ne peuvent parler comme les humains. Tournures de phrases insolites et images percutantes permettent au lecteur de s’engouffrer dans la brèche. L’imaginaire du poète se met au service d’une volonté qui définit l’entièreté du recueil, à savoir un regard bienveillant vis-à-vis du monde, sans pour autant sombrer dans la mièvrerie. Bien au contraire : Anton célèbre la vie, mais également son ironie et les limites d’une humanité cupide et dangereuse.
Une écriture fluide
L’auteur a imaginé ce recueil, de façon à le présenter de la manière la plus fluide possible. Alors qu’on a droit à un portrait ultra-positif et inspiré de Brigitte Bardot, le lecteur est invité à se joindre aux pensées du poète, alimentées par la nature sous toutes ses formes. Après les Célébrades, le livre s’ouvre sur une seconde partie intitulée Hivernades. Cette fois, Anton profite de ces pages pour rédiger et reporter des haïkus contemplatifs, nettement plus visuels que le début du recueil, très précis puisqu’il ne concerne que la beauté et les talents de Brigitte Bardot. La nature est un moteur, un sujet de prédilection chez tous les poètes, depuis des siècles et des siècles.
Cette étape du recueil forme une préparation, un terrain paradoxalement fertile à l’exposition de l’amour selon le poète. Ces Amourades touchent tout le monde : avec simplicité, l’écrivain se souvient de ses ébats et y songe avec mélancolie. Il y a un côté espiègle et passionné : l’auteur porte un regard amusé sur les autres couples, tandis que le sien se détache du reste : au-dessus, par sa passion et son intensité. Il ne s’agit pas seulement de l’amour, mais aussi de la débauche et du sexe, même des relations profitables.
Concernant ses Naturades, on y retrouve tous les ingrédients d’une promenade bucolique, parfois interrompue par de tristes constats qui rappellent les dérives de notre monde. Cet ouvrage vivant aborde avec bienveillance tous les aspects de la vie simple : une existence pourtant secouée de problématiques vibrantes et brûlantes : l’exploitation de la faune et la flore, la perte de repères. Dans ses Quotidienades et Randonades, celui qu’on surnomme Ben signe ici une volonté qui rejoint ses Amourades : pointer du doigt ces paradoxes, sans moquerie, mais avec dérision, le poète porte un regard humble sur ce monde, dont il fait partie. Tous ces gens qu’il est amené à croiser est un reflet de lui-même, un écho du lecteur.
Un voyage au format haïku
Est-il nécessaire de produire du contenu exceptionnel pour toucher un lectorat ? Ce recueil de poésie sans prétention balaie des problématiques plus profondes qu’il n’y paraît. Les vers courts et légers grâce au format du haïku marquent l’esprit de manière efficace et immédiate. On voyage, on découvre, on se balade aux côtés d’un auteur passionné par les gens, l’amour, et la nature. « Un bon vivant » animé par la nature sauvage, telle qu’elle est, sans retouche ni pincettes. Cette réunion de poèmes brefs, mais efficaces fait voyager le lectorat l’espace de quelques minutes.
Un ensemble harmonieux au sein de « Célébrades »
Cette composition est un ensemble harmonieux, puisque tous les thèmes se répondent entre eux, créant une harmonie artistique remarquable. Est-ce que l’ordre présenté correspond à la chronologie de composition des vers ? Impossible à dire, mais une symbolique profonde semble émerger : il appartient à chacun d’interpréter l’ouvrage comme il le souhaite, puisque la poésie ouvre toutes les possibilités, en termes de sensibilité.
Les thématiques pourraient se réunir au sein d’un grand tableau de maître, une toile, avec tout au-dessus, une représentation de Brigitte Bardot en Madone, dévoilant une plaine naturelle, dont certains endroits seraient ensevelis sous la neige. Dans ce paysage, l’œil perçoit des amants s’embrasser, des gens mourir, se perdre, devenir fou, des personnes qui s’émerveillent pour un rien et d’autres qui s’en fichent. Au sein de cette œuvre d’art, toutes les cultures et tous les animaux forment un tout : un ensemble qui se juxtapose avec l’humanité qui se transcende, cause de sa propre et future autodestruction. Seule demeure une lueur d’espoir, représentée par la nature elle-même, dont l’humain cherche à s’extirper sans succès.
Le site du livre : https://celebrades.fr/
Le site de l’auteur : http://www.bernardanton.com/
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