PHOTOGRAPHIES DE STÉPHANE LANIRAY
Exposition photo FARWEST à The Recording Gallery, un lieu d’exposition unique implanté dans des studios d’enregistrement.
En septembre 2018, l’ouragan Florence s’abat sur la côte Est des États-Unis. Une webcam fixée sur un ancien phare près de Cape Fear en Caroline du Nord diffuse en direct des images impressionnantes. La bannière étoilée, habituellement symbole d’un nationalisme puissant, y apparaît déchirée, fatiguée, visiblement malmenée par les éléments déchaînés. Stéphane Laniray photographie des captures d’écran de cette webcam avec un appareil moyen format sur des films polaroid. Ces photos saisissent l’antagonisme d’un pays synonyme de liberté, pétri de clichés enivrants hérités de John Ford ou de l’Amérique triomphante de l’après- guerre qui fascine autant qu’elle inquiète.
Stéphane Laniray
Le road-trip photographique de Stéphane Laniray s’en fait l’écho.
Il nous emmène dans le sud des États-Unis, aux sources du blues et du rock. À Memphis, au Sun Studio, là où le King a lancé sa carrière.
Ou encore à Nashville, la “Music City” où les studios ”Third Man Records“de Jack White attirent des musiciens du monde entier venus puiser leur inspiration dans les racines de la country. Une série de douze photos d’amplis en noir et blanc énumère les pierres angulaires de l’histoire de la musique américaine : Carlsbro, Music Man, Matamp ou encore Marshall. Car, bien que britannique, cette dernière marque mythique imprègne l’histoire du rock’n’roll US, de Jimi Hendrix à Lana del Rey en passant par une scène devenue culte dans le film This is Spinal Tap (1984) de Rob Reiner : “These go to 11 !”.
Parcours
Derrière les close-up monochromes de ces signatures iconiques se dévoile également une Amérique fissurée. On se souvient en effet que la marque mythique Gibson a déposé le bilan en 2018 et que Fender est en proie à de grosses difficultés financières.
D’ailleurs, en continuant la route, on devine Détroit et ses friches industrielles. Ces photos prises avant la renaissance de la ville, qui doucement se redessine, rappellent que le temps de la splendeur de la Motor City n’est plus.
On s’arrête aussi dans des motels, au hasard des highways, comme pour réviser cette grammaire visuelle qui modèle notre fantasme de l’Amérique, souvent ponctué de cactus, de pancakes et de stations-services. Pour ces lieux de sommeil ordinaires, le photographe a choisi une impression à l’agrandisseur sur papier ultrabrillant Fujiflex, qui révèle cette Amérique contrastée, où le banal devient parfois sublime.
Et enfin, il y a ces femmes. Anonymes, chanteuses ou performeuses, on les imagine chacune libre et forte.
Au fond, à travers ces 32 photos, Stéphane Laniray brosse le portrait d’une Amérique immense, complexe, détraquée voire schizophrène… mais toujours incroyablement photogénique. Un FARWEST qui continue décidément de fasciner et d’étonner le monde, y compris dans ses dérives.
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