Alfred Bernardin, directeur passionné du restaurant da Alfredo à Paris, a consacré sa vie à la restauration, un métier qu’il considère comme un véritable art. À 46 ans, ce fils d’artisan restaurateur a débuté sa carrière dès l’âge de 16 ans avec des stages dans de prestigieux établissements parisiens. Fort d’une riche expérience internationale, de New York à Los Angeles, il est revenu en France pour mener à bien sa propre vision de la gastronomie. Rencontre avec un entrepreneur qui ne cesse de réinventer l’art de recevoir, tout en restant fidèle à ses valeurs de fraîcheur et d’authenticité. Interview d’Alfred Bernardin pour Epicurisme Mag, par Yanis Bargoin
Vous avez un parcours impressionnant dans la restauration. Pouvez-vous nous en parler ?
Alfred Bernardin : J’ai 46 ans, et mon parcours a toujours été lié à la restauration. J’aime me définir comme un artisan restaurateur, car je pense que beaucoup ont oublié l’essence de ce métier, devenant plus des hommes d’affaires que de véritables restaurateurs. Moi, je suis tombé amoureux de ce métier très jeune, probablement grâce à mes parents. Nous allions souvent au restaurant et j’adorais discuter avec les patrons, les voir sourire aux clients, et j’ai trouvé que cela pourrait être un métier agréable.
J’ai commencé par des stages à l’âge de 16 ans dans de grands restaurants parisiens pour vérifier si c’était vraiment ce que j’aimais. Ensuite, j’ai poursuivi ma formation en Suisse, à Montreux, et effectué plusieurs stages dans des hôtels prestigieux comme le Crillon à Paris, le Méridien à Londres, et le Hyatt à Paris. Après cette formation intensive de trois ans, j’ai travaillé dans différents établissements, évoluant en cuisine et en salle.
Rapidement, j’ai compris que Paris était un peu trop petit pour mes ambitions, alors je suis parti pour New York. Là-bas, j’ai commencé comme serveur, puis manager, et je suis devenu directeur de restaurants dans un hôtel connu de Los Angeles. J’ai ensuite été directeur d’un hôtel à Saint-Barthélemy avant de revenir à New York pour diriger un restaurant et une boîte de nuit. Finalement, à 28 ans, j’ai décidé de lancer mon propre restaurant à Paris, un vieux bistrot que j’ai modernisé tout en conservant son charme.
Avec le temps, j’ai dû vendre, car la crise financière me faisait peur. Après une aventure inattendue en tant qu’organisateur de concerts pour l’artiste Prince en France et en Europe, je suis retourné à la restauration et j’ai repris le Renoma Café à Paris, un établissement de 180 couverts. Malgré les nombreux défis, j’ai réussi à en faire un succès pendant quelques années. Puis, j’ai décidé de partir pour ouvrir un restaurant plus petit, Da Alfredo, car je crois en un renouveau des petits bistrots tenus par de vrais restaurateurs.
Pourquoi avoir choisi de proposer de la cuisine italienne chez Da Alfredo ?
Alfred Bernardin : J’ai voulu conserver l’identité italienne du restaurant, même si j’ai toujours été spécialisé dans la cuisine française. Pour moi, un restaurant, c’est comme un être cher, tu ne peux pas tout démolir si le lieu est déjà magnifique et possède une âme. Le restaurant Finzi existe depuis 1984, et il marchait très bien pendant 30 ans avant de connaître des difficultés et rebaptisé depuis 2023 en Da Alfredo. Mais je crois que la flamme ne demandait qu’à être ravivée.
J’ai conservé l’équipe en cuisine qui était là depuis 20 ans, et nous avons retravaillé la carte ensemble pour l’adapter aux attentes d’aujourd’hui. Par exemple, nous avons introduit des plats classiques italiens comme l’artichaut à la romaine et des pastas faites maison tous les jours, car pour moi, un bon restaurant italien doit proposer ces classiques.
Yanis Bargoin : Quels sont les plats signatures chez Da Alfredo ?
Alfred Bernardin : Nous proposons des plats faits maison avec des ingrédients frais, tous les jours. Toutes nos pâtes, par exemple, sont préparées chaque matin. Cela demande de l’espace, du savoir-faire, et la bonne recette. Mais une fois que l’on sait faire des pâtes maison, c’est plus simple et meilleur que de les acheter toutes faites. Nous avons également des spécialités comme les artichauts à la romaine, les escalopes milanaises, et des pâtes à la carbonara que nous préparons à la minute.
Yanis Bargoin : Que pensez-vous des pâtes carbonara en boîte de conserve de la marque Heinz ?
Alfred Bernardin : (Rires) Les pâtes carbonara en boîte de conserve, ça me fait peur pour l’avenir de la cuisine ! C’est tellement loin de la réalité de ce plat. Nous, on fait tout à la minute. Pour être honnête, je ne suis pas du tout fan de ces produits. Pour moi, la cuisine, c’est avant tout une affaire de passion et de respect des ingrédients. Les sauces industrielles, comme celles de Heinz, sont souvent conçues pour être réchauffées rapidement au micro-ondes, et cela va à l’encontre de tout ce que je crois en tant que restaurateur. Je n’utilise jamais de micro-ondes dans mon restaurant, car je pense qu’il tue la saveur des aliments et dénature la qualité des produits. Chez Alfredo, nous prenons le temps de préparer chaque sauce à partir de zéro, en utilisant des ingrédients frais et en respectant les recettes traditionnelles. C’est ainsi que l’on obtient une vraie sauce carbonara, celle qui a du goût et qui raconte une histoire.
Un dernier mot pour nos lecteurs ?
Alfred Bernardin : Merci à vous. J’invite tous les amoureux de la bonne cuisine à venir nous rendre visite chez Alfredo. On y met tout notre cœur et notre savoir-faire, et j’espère que cela se ressent dans l’assiette.
Da Alfredo 182 Bd Haussmann 8e Arrondissement
Retrouvez d'autres articles sur Epicurisme Mag