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Accessoires / mode

Le jour du dépassement: écologie et rapport à la mode

C’est ce premier août 2024 qu’est déclaré avoir été atteint le jour du dépassement annuel par l’ONG Global Footprint Network. Si les débats sur l’écologie ont encore du mal à trouver leur public, pour le secteur de la mode par exemple il s’agit d’un enjeu non négligeable pour assurer la pérennité du secteur à l’avenir.

L’évènement n’a pas été tant médiatisé, noyé entre l’information sur les conflits géopolitiques actuels et quelques résultats des épreuves Olympiques de Paris. Pourtant, ce premier août 2024, le monde a atteint son jour du dépassement. Et la date est encore plus précoce à l’échelle nationale pour la France, qui a atteint son jour du dépassement le 7 mai cette année. Un bilan inquiétant qui démontre l’urgence d’une transition écologique à tous les niveaux. L’occasion de faire le point sur l’avancée en la matière de l’industrie de la mode, étant connue pour être l’une des plus polluantes.

Le jour du dépassement, c’est quoi ?

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crédits: Adobe Stock

Campagne de communication initiée en 2006 par l’ONG Global Footprint Network, le jour du dépassement représente un indicateur précieux de la consommation des ressources à l’échelle mondiale. Il s’agit en effet d’une mesure de ce qu’est capable de produire et de régénérer la planète en termes de ressources naturelles en un an. Un calcul de l’empreinte écologique mondiale. A compter de la date établie par le jour du dépassement, c’est comme si la Terre produisait à crédit. Ce qui signifie que cette année, depuis le 1er août, la Terre puise dans des ressources auxquelles elle n’aurait pas dû avoir recours avant l’année prochaine. Forçant les écosystèmes à accélérer un peu plus chaque année, l’Humain mène la planète à l’épuisement de ses ressources. Selon Natacha Gondran, professeure en évaluation environnementale à l’école des Mines de Saint-Etienne, dans une interview pour Libération : « L’empreinte écologique est un indicateur de durabilité. Il compare la surface de sol disponible à celle qui serait nécessaire pour produire tout ce que nous consommons et qui vient des végétaux ». D’autres paramètres sont également pris en compte tels que la surface du sol nécessaire pour absorber les émissions de gaz à effet de serre. En France, comme évoqué précédemment, la date du dépassement de cette année est fixée au 17 mai. Un indicateur parlant démontrant que si tous les humains de la Terre vivaient et consommaient comme des Français, la date du dépassement ne serait que plus précoce.

Consommation et pouvoir d’achat

crédits: Shutterstock

En France justement, une industrie tout à fait polluante fait son rayonnement : celle de la mode. Même si les maisons de luxe parisiennes ont une clientèle majoritairement étrangère, les Français aiment s’habiller. Se positionnant, en 2018, comme les quatrième plus gros dépensiers d’Europe du secteur de la mode selon des chiffres de Statista publiés en 2022, il va sans dire que la question de l’enjeu écologique dans l’industrie du textile est à prendre en compte. Malgré quelques initiatives prises par les marques pour réduire leur impact environnemental suite à une prise de conscience générale et un élèvement des voix de la part de la population, la plupart des consommateurs continuent d’effectuer leurs achats vestimentaires auprès des enseignes de fast-fashion. Une des explications à ce comportement d’achat est la baisse constante du pouvoir d’achat des Français depuis la crise sanitaire du Covid19. Voyant ainsi leurs moyens réduits, les consommateurs font passer la question de l’écologie au second plan. Pour certains ce n’est d’ailleurs même pas un sujet de réflexion, le porte-monnaie peu remplit ne le permettant pas. Si en 2018 les Français dépensaient en moyenne 530 euros par an en vêtements, ils ne sont déjà plus qu’à 430 euros annuels en 2020 selon un rapport d’Euratex. Les moins privilégiés se tournent par ailleurs vers l’ultra fast-fashion pour se vêtir, industrie à l’impact désastreux socialement et écologiquement parlant. Afin de contrer le phénomène de surconsommation de l’ultra fast-fashion présent en France, l’Assemblée Nationale a voté à l’unanimité en mars dernier une loi visant à réguler ce mode de production sur le marché du pays. La loi, une fois en vigueur, permettrait notamment d’instaurer des pénalités aux géants de cette industrie tels que Shein et de mettre en place un équivalent du nutri-score alimentaire que l’on connaît tous pour les produits textiles. Une avancée en faveur de l’écologie, pour autant que cette loi gagne l’approbation du Sénat.

L’écologie, une mode ?

crédits: Shutterstock

Si l’écologie est au cœur des discussions depuis quelques années dans l’industrie de la mode, il semble tout de même légitime d’interroger l’efficacité de ces débats et leur capacité à donner suite et non à n’être que le résultat d’un effet de mode. A la manière des enjeux d’inclusivité et de représentation sur les podiums et dans les magazines, le sujet de l’écologie représente une cause soumise à l’hypocrisie de l’industrie le temps que la tempête des reproches et des réclamations du public se calme. Selon un article de Dominique Muret pour FashionNetwork : « La transition écologique de la mode et du luxe avance, mais au ralenti ». C’est aussi ce qu’a pointé du doigt le sommet Italien Venice Sustainable Fashion Forum dont la seconde édition s’est tenue en octobre 2023. Pour autant, l’existence et la création de ce sommet à eux seuls prouvent une réelle implication de la part de certains acteurs de la mode, accompagnée d’une volonté de changer les systèmes de production et de consommation pour une mode plus écologique et moins polluante. De nouveaux schémas comme celui de la mode circulaire se sont développés dernièrement. Cette dernière consiste à se battre contre la mode dite jetable en limitant l’empreinte carbone d’un vêtement, de sa conception à sa longévité une fois entre les mains des consommateurs. Selon une étude menée par la Fédération de la mode circulaire, le secteur aurait généré un chiffre d’affaires de 6,8 milliards d’euros en 2023. La pratique de cette alternative responsable à l’industrie de la mode classique ayant progressé de 17% cette même année, les prévisions futures sont plutôt encourageantes : on estime un chiffre d’affaire pouvant atteindre les 14 milliards d’euros d’ici 2030. Une initiative durable portant l’espoir de révolutionner l’industrie.

Malgré tout, beaucoup d’actions concrètes attendent encore le secteur de la mode et du prêt-à-porter, afin d’assurer une longue et saine vie à une industrie pour le moment encore problématique.

Written by Soumeya